Au défaut de l'armure

par Jean Michel Salvador  -  23 Février 2018, 15:24  -  #Klimt

La femme fatale de la fin du XIXème siècle c’était la belle tentatrice du « péché » de Franz Von Stuck avec son énorme anaconda… dont le puissant corps annelé épousait les formes… faisant saillir ses seins sous la pression… sans oublier bien sûr de se glisser voluptueusement entre ses cuisses… tout contre ses lèvres humides… quant à elles bien à l’abri des regards.

Sensualité de Franz von Stuck, 1891

Sensualité de Franz von Stuck, 1891

Un python outrageusement phallique pour une femme spectrale… aux yeux aux cernes appuyés comme si la béance humide de son sexe… montait à la tête. Voilà donc la méduse dont les amateurs de peinture symboliste raffolaient. Ça vous susurre de partout mais attention sa morsure est empoisonnée !

Au défaut de l'armure

Une femme fatale au corps... hanté d’animal. Fascinant le spectateur pour mieux le dévorer. Von Stuck peindra d’ailleurs un « baiser du sphinx », greffant le haut du buste d’une jeune femme sur le corps d’un carnassier… le tout sur un violent fond rouge. Où il s’agit dans un fantasme dont l’oralité ne fait guère de doute d’aller s’écraser contre un sein pour mieux se faire… engloutir et déchiqueter. Où il faut bien regarder au passage dans la pénombre les étranges... pattes de l'animal(e).

Détail du baiser du sphinx de von Stuck, 1895

Détail du baiser du sphinx de von Stuck, 1895

Il faut savoir que ces œuvres de Stuck mettant en scène une jeune femme étreinte par un terrifiant serpent à la peau sombre étaient à l’époque l’objet d’un véritable culte. Sans relâche, les gens allaient se découvrir devant l’icône au python (chapeau bas messieurs !) avant d’examiner de plus près la toile tendue au sein d’un immense cadre à moulures dorées. Les volutes et les tubulures de ces cadres s’ajoutaient aux circonvolutions de l’épais collier noir formé par le reptile... pour détourner leur regard de ce corps de femme tentateur mais aussi terriblement inquiétant.

 

«                                                            …, un or

Agonise selon peut-être le décor

Des licornes ruant du feu contre une nixe, » (Mallarmé)

 

Où il s'agit de suivre des yeux une peau de serpent élastique dont les écailles dessinent des motifs géométriques qui semblent comme animés de lents mouvements de contraction et de relâchement… une déformation qui fait saillie… où la géométrie aide à mieux voir et à bien mesurer les fascinants gonflements des volumes. Où l’on se rassure en dévorant des yeux les enroulements tortueux et toriques d’un serpent plutôt que d’affronter en face un sexe que l’on ne saurait voir… préférant sans doute dans le noir y coller ses lèvres comme pour s’y enfoncer.

 

Mais c’est bien sûr au cœur de la chevelure de la Gorgone… Méduse (Gorgo pour les grecs, avec ces o,  ces bruits de gorge… ces borborygmes !) que grouillent les serpents. Cette divinité dont les yeux ont le pouvoir de vous pétrifier pour l’éternité fascina Stuck et les symbolistes. Les grecs la représentaient de face, les yeux protubérants, avec une large bouche distendue aux lèvres épaisses… et la langue qui dépasse. Freud y voyait là ce sexe féminin qui selon sa théorie phallocentrique ne pouvait être vu de face sans angoisse… normale pour la castratrice par excellence qui vous la fige pour mieux vous la couper.

Méduse à la fontaine, oeuvre perso

Méduse à la fontaine, oeuvre perso

Argh… ce sexe qui monte à la tête… pour parfois s’échapper et vous mener par le bout de l’œil. En cette même fin du XIXème Odilon Redon aimera dans ses fusains et ses gravures transformer l’œil en un organe à part entière… indépendant et monstrueux… cernant le trou noir de la pupille et le disque rayonnant de l'iris d’un globe au blanc glaireux... puis de lèvres, de plis, de poils… voire de pattes ou de tentacules. Où j’imagine une petite bête plus qu’étrange tel qu’il aurait pu en dessiner… caressée du bout des doigts par celle qui quelques décennies auparavant figea bel et bien ses spectateurs (ou tout au moins les secoua dans un rire de déni) : l’Olympia de Manet.

L'oeil d'Olympia, oeuvre perso

L'oeil d'Olympia, oeuvre perso

Un œil baladeur… petit globe rond et clair que des mains s’échangent via la fente d’un rocher dans un coin d’une autre scène... réalisée cette fois par Füssli au XVIIIème. En fait ici, c’est une des trois Grées qui le recueille avec précaution dans ses doigts filiformes… et ce pour une bonne raison: c’est qu’il leur est extrêmement précieux puisque, à elles trois... elles n’en ont qu’un !! Les Grées qui vivent dans les ténèbres sont les sœurs oubliées des gorgones. Persée s’est emparé de leur œil pour qu'elles lui ouvrent la voie... il ne le leur rendra qu’une fois sa mission accomplie… lorsqu'il aura tué la gorgone… dont la tête tranchée finira par orner l’égide d’Athéna.

Persée rendant leur oeil aux Grées de Füssli

Persée rendant leur oeil aux Grées de Füssli

Une égide chère à la sécession Viennoise qui va prendre la relève de sa consœur Munichoise (dont Stuck fut un des membres fondateurs). C’est Gustav Klimt (le fils d’un orfèvre ciseleur de métaux précieux) qui réalisera l’Athéna de l’affiche de la première exposition du groupe. Puis qui peindra la déesse avec son armure d’or et d’argent… vous fixant de ses yeux gris clair… tout en arborant fièrement un médaillon que la face de Gorgo travaille au repoussé... comme pour mieux vous happer de l’autre côté du miroir d’or... sans oublier les aréoles des seins de Triton qui semblent vous fixer par delà les ténèbres verdâtres du fond... tout comme toutes les écailles de son corps de poisson-serpent avec ces petits points d'or en leur centre. Des yeux partout... à foison!

 

« Elle, défunte nue en le miroir, encor

Que, dans l’oubli fermé par le cadre, se fixe

De scintillations sitôt le septuor. » (Mallarmé)

Pallas Athena de Gustav Klimt, 1898

Pallas Athena de Gustav Klimt, 1898

Un Klimt qui va tenter de maîtriser la méduse en corsetant l'épouse imprenable d'un grand industriel viennois (qui finira par succomber à ses charmes)... dans une gangue de métaux précieux et d’ornements. Où il s’agit de l'affubler de feuilles d’or et d’argent telle une mosaïque byzantine... pour en faire une icône au charme magique et dangereux... enchâssée dans son cadre sacré.

 

Klimt réalise en 1907 le fameux portrait d’Adèle Bloch Bauer. Où le modèle se retrouve sous la garde d’une égide pareille à celle d'Athéna... éblouissante et constellée d’yeux. Les lignes ciselées et les surfaces dorées structurent constamment et de manière obsessionnelle une figure ovale au centre de laquelle se trouve parfois une forme circulaire. On ne ne vous fait pas de dessin... comme pour le portrait de Pallas Athéna... il y a des yeux à foison... partout! Sans oublier bien sûr les yeux d'Adèle... demi-lunes pendues aux paupières supérieures... brillantes comme des joyaux. Pour Jean Clair, la conjugaison du décor strictement géométrique et du brillant des matériaux, l’éclat des fonds dorés à la feuille associés aux volutes, triangles et carrés, font du tableau tout entier un bouclier apotropaïque contre... le mauvais oeil. Il faut en fait bâtir tout un apparat décoratif pour conjurer la charge érotique… pour la diffracter sous les multiples reflets d’une peau métallique et précieuse qui ondule et chatoie… pour mieux vous aveugler bien sûr.

 

Montage perso autour de la robe d'Adèle Bloch-Bauer sur fonds de Soulages

Montage perso autour de la robe d'Adèle Bloch-Bauer sur fonds de Soulages

Adèle servira également de modèle pour ses "Judith"… en particulier celle où la meurtrière, seins nus, voluptueuse, traîne la tête de sa victime par les cheveux… mains convulsées crispées…. comme des serres de rapace. Où l'on savoure masochistement l'élégance racée et charmeuse de la femme fatale plongeant ses mains dans une chevelure qui vire au rouge sang. 

 

Une femme fatale, hautaine, énigmatique et perverse... qui vous regarde de haut... qui s'envoie même en l'air dans des aplombs audacieux sur les grandes fresques de Klimt qui devaient décorer l'université de Vienne et où l'on aurait du voir, en une contre plongée impressionnante et inconvenante, des grappes de corps dans des attitudes vertigineuses... formant de sidérantes colonne de nus sur fond de nébuleuses et de galaxies.

 

Une femme exaltée en ses vices et charmes qui n'est plus que chair enchâssée d'or et de tissus chatoyants. Une somptuosité inquiétante pour un continent inconnu (... noir selon Freud). Une femme qui n'est de chair que pour être attirante mais qui n'est au fond qu'énigme. Une sphinge non plus dévoratrice mais qui prend ses distances... délices et effroi garantis dans le suspens du châtiment.

Judith II de Klimt, 1909

Judith II de Klimt, 1909

Chez Klimt les tentacules menaçants de la méduse ou de la pieuvre se plaquent d’or pour mieux se figer. On assiste à tout un processus de fossilisation ou de pétrification… où il s’agit de changer le corps de la femme en gemmes, joyaux, tessères de métaux durs et de lithifier la… Chose. Finalement n'est ce pas plutôt le peintre la véritable gorgone ?

 

Mais pourquoi ce décor de losanges d’argent en... dents de scie ? C’est pour mieux te… ...mon enfant !

 

Où l’œil se retrouve captif de l’ornementation, subjugué par le lacis des arabesques et des triskèles, prisonnier d’une chrysalide incrustée de cuivre, d’or, d’argent, de corail ou de nacre. Comme une végétation tropicale invasive… non… un bourgeonnement de polypes… finissant par ériger une barrière de corail…. qu’on appelle d’ailleurs en grec gorgônion… puisque selon la légende c’est bien la tête tranchée de Gorgo qui entraîna le durcissement de ces plantes marines une fois que Persée eut déposé la face démoniaque sur un tapis d’algues.

 

Une cristallisation donc, un phagocytage alvéolaire… une marée de vulves, triangles, yeux, amandes, trous, spirales envahit l’espace… le motif des yeux, des cernes, des ocelles, lui-même rehaussé, repris, souligné et comme explicité par le symbole sexuel de l’amande fendue inscrite à l’intérieur d’un carré.

L'attente de Klimt, carton pour la fresque du palais Stoclet, 1905-09

L'attente de Klimt, carton pour la fresque du palais Stoclet, 1905-09

Détail de l'arbre de vie de Klimt, carton pour le palais Stoclet

Détail de l'arbre de vie de Klimt, carton pour le palais Stoclet

Toute une structure dessinée court dans les couleurs... les tenant comme dans un filet... la toile vous tient à l'oeil.

 

La femme est enchâssée jusqu'à l'étouffement... enfermée en elle même. 

 

Que sur son corps se dresse le monument au phallus d’or… qu’elle fait par ses frémissements s’ériger!

 

C'est que l’or de la banque de la bourgeoisie viennoise se déplace vers l'art, l'esthétique usurpant désormais la place de la religion, et qu'il se métamorphose… car c’est à l’aloi de l’or, comme matériau incorruptible, que tout cela se mesure. Elles qui, selon le peintre lui-même, pourraient supporter toujours plus d’or ! N’en jetez plus ! 

 

Karl Wittgenstein régnait alors sur la sidérurgie austro-hongroise… Il fit réaliser par Klimt le portrait de sa fille Gretl… la grande sœur de Ludwig... l'auteur du tractatus logico-philosophicus.

 

"Sur ce dont on ne peut parler, il faut garder le silence".

 

Adolphe Stoclet qui dépensa sans compter pour qu’on lui érige un palais extraordinaire dont la décoration intérieure fut réalisée par Klimt était quant à lui le fils d’un magnat du charbon bruxellois. Comme un indice révélateur: n'y aurait-il pas du noir là-dessous !

 

« A la surface l’acier coule en serpents de feu… »

 

Quoi de plus secret que l’évidence. L’évidence aveugle. Sous la grande séduction de ces surfaces éblouissantes et colorées se tapit la bête. Elle se cache sous un… bouclier… qui égare le regard mais qui ne fait que la reproduire en plus grand.

 

Où la femme se retrouve lovée dans le déroulement fastueux des tissus... chamarrés par tous les rêves de luxe qui se confondent avec les aveux de luxure des alcôves. Sous le signe de l’excessif la femme Klimtienne étale son corps. Et cet étalage est gain de surface… appropriation monumentale. Déjà les froncés, froissés, plis, fentes et ruchés, crevés et boutonnières des soirées viennoises n’étaient que la reproduction agrandie des délicats détails du sexe féminin.

 

Le corps n'est plus que le prétexte à un développement graphique d'une élégante somptuosité. Une sorte d'auréole s'étire et se love autour d'elles. Comme un étrange ciment, un liant chatoyant s'insinue entre les corps. Ces effets décoratifs ne cesseront de croître... finissant par devenir la finalité même de l'oeuvre. Texture dense et miroitante... Profusion végétale...

 

Une sensualité que l'on retrouve dans ses dessins.... où Klimt se lâche... le trait s'embrase... volubile et tremblant. Tout un jeu graphique de boucles et de friselis enserre la chair... obsessionnellement. Comme un journal intime. On l'imagine dans sa légendaire tunique sous laquelle il était nu et libre de ses mouvements. Tous ses modèles y passeront. Même si par ailleurs il mènera une vie régulière et bourgeoise... se refusant les plaisirs du lit d'Emilie Flöge... sa jeune belle soeur dont il fut un parrain très complice mais probablement... platonique.

Dessin de Klimt

Dessin de Klimt

Quand il sort la femme de son clinquant de bazar et qu'il la dessine... il la croque dans une nudité crue, provocante... inconvenante... d'un trait nerveux parfois coulé... sensuel... souvent repris et repassé... effiloché... directement relié à la brutalité du désir. Ses modèles, jambes écartées, se caressent… Comme va le ressac de la jouissance... comme la main au centre dans le fouillis des boucles. Un dessin symptôme du désir de la main. Pour des entortillements d'anguilles.

Dessin de Klimt

Dessin de Klimt

Dessin de Klimt

Dessin de Klimt

Dessin de Klimt

Dessin de Klimt

"Le bruit court qu’un soir elles auraient été plus de deux, qu’à une demi-douzaine elles se seraient couchées, enlacées et auraient créé ensemble une sorte de remuement très lent, incompréhensible, faisant penser à de petites pieuvres dans un bassin."

 

Où les nus s'enchevêtrent entre eux à la façon d'étranges soieries.

 

Mais quel est donc ce rêve qui l'habite, fait frémir son corps, le tord et l'étire... 

 

Et comme un rire dans encore plus d’or et le grand éclat blanc.

Montage perso autour des petites pieuvres de Klimt

Montage perso autour des petites pieuvres de Klimt

La Femme n’est pas toute comme dirait Lacan.

 

« Impétueuse, déchaînée, elle est de la race des vagues. Elle se lève, elle approche, elle se dresse, elle atteint, recouvre, lave un rivage, coule épouser les moindres plis de la falaise, déjà elle est une autre, se relevant, lançant haut l’immensité frangée de son corps, se succède, et recouvre, découvre, polit, fait luire le corps de pierre avec de doux reflux qui ne désertent pas, qui reviennent à la non origine sans bord, comme si elle se rappelait pour revenir comme jamais encore. » (Hélène Cixous)

 

Parfois seul le visage émerge… rendu avec une hallucinante et presque obscène précision mimétique. Et parfois dans les tissus chamarrés et bariolés des seins et des croupes apparaissent. La femme sait nous montrer son cul ce qui choqua plus d’un viennois.

Oeuvre perso (autour de Toppi et Klimt)

Oeuvre perso (autour de Toppi et Klimt)

Aux seuls endroits où se montre sa chair, comme au défaut de la cuirasse… terriblement vulnérable, un exquis tressage de blanc bleuté de rose et de jaune... argh... parfois couronné d’une toison noire ou flamboyante ou rehaussé d'une spirale d'or dans du vermillon... et ce toujours dans l'ouverture de tissus plus ou moins abstraits.

Détail de la deuxième Judith de klimt

Détail de la deuxième Judith de klimt

« A fond orange coq de roche avec des fleurs des chrysanthèmes ébouriffés des oiseaux aux longs becs aux longs cous sinueux parmi les tiges j’écartais les fleurs les hérons découvrant cette comment dire laiteuse lait plus blanc que le blanc bleuâtre à force d’être blanc avec des ombres d’un vert léger jade courant sur la peau transparente me désaltérer je ne pouvais finir cesser…

 

…reflets alors abricot tango à l’intérieur de ces cuisses écartées riant faisant entendre un bruit de gorge puis respirant peu à peu plus fort appuyant de ses deux mains sur ma tête l’enfonçant ses fesses froissant la soie bougeant lentement teintées d’ombres orange m’enfonçant m’enfouissant par saccades j’écartai encore sillon bistre au fond ma langue…. »

Les amies de Klimt, 1916-17

Les amies de Klimt, 1916-17

Une belle chevelure rousse et barbare s'étale et s'enroule autour des corps... parfaitement peignée... pour on ne sait quel couronnement barbare. Fait penser à la femme vampire de Munch dont la chevelure rouge sang retombe en filets sur le visage de l’homme comme les tentacules d’une pieuvre sortie du fond d'un fjord… On retrouve avec Klimt cette volupté d'enveloppement. Mais chez Munch prédomine la figure de sangsue... qui vous prend en bouche. Chez Klimt on s'étreint et d'abondance on s'étouffe, se love, se mêle et se mixte.

Oeuvre perso autour de Munch

Oeuvre perso autour de Munch

L’ondine, la femme serpent de l’Art Nouveau ondule... comme une Ophélie dans le lent écoulement des eaux qui l'enserrent. Un être sous-marin lascif... Où le corps désiré n'est qu'une fuite.

 

La boucle va devenir en fait le bouclier apotropaïque de la nouvelle imagerie de l’Art Nouveau.

 

Ne va pas leur montrer un seul poil frisé mon ange… les anges ça n’a pas de poil frisé…

 

Où il s'agit de noyer le point noir sous une surface cinq fois plus étendue, comme un problème de topologie à la Adolph Loos… aux o bouclés… et qui s’opposait aux proliférations végétales exubérantes d’Horta… préférant les lignes droites et les cubes… Où l’ornement devient un crime… Le temple de la Sécession sera un simple cube surmonté d'une sphère en fer forgé ajouré. "Blanc, brillant, sacré et chaste" pour l'architecte Olbrich... des "toilettes publiques... assyriennes" pour la critique. En son sein... la frise Beethoven et la ligne claire, précise mais parfois terriblement ondoyante de Klimt.

 

Alors il faut l'imaginer en train de se promener en pleine nature, équipé de son prospecteur, un carton percé d’un orifice… carré, pour isoler et cadrer les morceaux de paysage… ayant en fait tout de quelqu’un prenant grand plaisir à la chasse érotique. Haha! Méfiez-vous donc de ce que veulent étouffer les emboîtements de cubes de la maison Wittgenstein… cachez moi donc ces belles formes... contorsionnez les dans un cube pénitent et puritain... un cube plutôt que le triangle fendu d’une femme à poil. Et donc pour Klimt, une approche originale de la peinture de paysage tant par le cadrage, qu'une frontalité hardie, un déferlement du détail... un souci décoratif qui va jusqu'à dénaturer son sujet... des vues souvent dénuées de perspective... Où l'air est absent. Il faut savoir reprendre sa respiration. Mais dans quel trou perdu suis-je donc?

 

Mais qui donc aurait horreur du sexe comme la nature aurait horreur du vide?

 

 

Forêt de sapins de Klimt, 1901

Forêt de sapins de Klimt, 1901

A travers une herse aux croisillons cloutés rougit un paradis de flammes…

 

Le schloss Kammer au fond de l'allée. Un petit pan de toit rouge!

Détail de l'avenue dans le parc de schloss Kammer de Klimt, 1912

Détail de l'avenue dans le parc de schloss Kammer de Klimt, 1912

Dans l’atelier tel qu’il le laissa à sa mort... une toile magnifique et révélatrice... le sexe bien visible sous les tissus.

Détail de l'épousée de Klimt, 1918

Détail de l'épousée de Klimt, 1918

Où il me faut prendre des Soulages pour les fonds, comme pour une ultime réconciliation de Klimt et de Loos. Des monochromes noirs striés et peignés. Où il s'agit de délivrer d’une lente incision la lumière recluse. Dans cette imminence du noir où rien n’est encore à voir... si ce n'est l'éclat du fendu.

 

Pli du noir sur noir. Réplique sans fin du noir. Un froncé noir. Le glacier noir d'un triangle tronqué.

 

Fait penser aux chevelures noires et compliquées des femmes japonaises… leur chignon savamment noué, traversé de longues épingles et relevé sur la nuque… la chose intouchable et proche avec tout ce qu’elle comporte de si désirable et de si bien défendu.

Mélusine, montage perso

Mélusine, montage perso

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