S'ancrer de bleu

par Jean Michel Salvador  -  15 Décembre 2017, 14:58  -  #Monory

Une toile de Monory, bien que représentant des baleines, me rappelle ces orques que l’on peut voir dans certains parcs aquatiques et qui passent et repassent sans cesse devant vous… coincés derrière les épaisses parois de verre en méthacrylate de leur énorme bassin… bien trop à l'étroit cependant pour qu’ils se sentent vraiment libres de leurs mouvements. Comme le font au zoo les grands félins dans leur cage, ces masses énormes tournent en rond, se ruant périodiquement sur vous tout en évitant bien sûr de se heurter aux parois... vous frôlant juste au passage… dans un grand frisson bleu

Détail d' "Abrévation du vide" n°14 de Jacques Monory, 2008

Détail d' "Abrévation du vide" n°14 de Jacques Monory, 2008

"Dreamtiger n°4" de Jacques Monory, 1972

"Dreamtiger n°4" de Jacques Monory, 1972

Fascinés, pétrifiés, nous restons en arrêt… devant ces monstres marins surgis du bleu profond pour venir se presser contre la toile. Ils sont à la fois terribles et sublimes, à condition toutefois de bien rester prisonniers... de leur cadre ! On jouit d’avoir froid dans le dos et d’en prendre plein la vue alors que leur taille impressionnante vient à se découper (s’entailler et se tailler une place) sur les bords tranchants du cadre... tandis que nous restons bien à l’abri de l’autre côté, dans la tension toute bleue... d’un voir exorbitant.

 

A première vue, l’œil de l’animal dans son cadre, lui, se détourne plutôt de nous. Il regarde obliquement… Il regarde aveuglément au loin, balayant mécaniquement l’horizon. Rien ne semble occuper de place centrale… Mais il faut bien « voir » que sans le cadre, sans cette séparation rassurante, on se retrouverait tout bonnement à découvert. Dans une angoisse totale : que va-t-il, que va-t-elle vouloir de moi ? Révélant dans ce retournement toute l’inquiétante étrangeté de l’objet regard exorbité que nous sommes alors. Comme dirait Lacan, le tableau est dans mon œil mais je suis aussi dans le tableau… visé, capturé, et comme ligoté par ce qui me regarde et que j’ignore… ce qui me cause comme désirant.

Extrait de "Jurassic world"

Extrait de "Jurassic world"

Où il s’agit d’avoir une peur bleue pour mieux s’éprouver et jouir d’un suspens… aussi  bien temporel que physique!

 

Selon Lacan, l’angoisse c’est la sensation du désir de l’Autre. C’est la fameuse histoire du type qui se retrouve confronté à une mante religieuse de trois mètres de haut alors qu’il est affublé d’un déguisement... peut être celui de la dépouille du mâle. Il se sait déguisé mais il ne sait pas en quoi. Surgit l’Angoisse. Ce n’est pas tant qu’il cherche à se voir dans les yeux de la mante… c’est aussi lié aux insignes dont il est affublé. Je ne sais pas ce que je suis comme objet pour l’autre. L’image dans les yeux est manquante. Qu’est-ce qu’il ou elle peut bien à cet endroit me vouloir ? Kierkegaard parlait de l’angoisse de la jeune fille au moment où pour la « première fois » elle s’aperçoit qu’on la désire. Lacan quant à lui ne cessera de répéter que l’angoisse c’est la sensation du désir de l’Autre.

Extrait de "Jurassic world"

Extrait de "Jurassic world"

Où l’on se retrouve donc en plein bleu… en plein suspens… en plein émoi… en plein effroi.

 

Qu’est-ce que l’effroi ? Selon Pascal Quignard c’est demeurer cloué sur place... c’est être asservi et à l’impossibilité de la fuite et à l’impossibilité du contact. Où il est interdit… de se retourner et de s’en retourner. Il y aurait d'ailleurs dans la prédation animale un double arrêt : celui du prédateur qui (pré)médite son coup… et celui de la proie qui se fige comme pour faire le mort. D’un côté les muscles bandés de la bête prête à bondir, l’œil anticipant le croisement des trajectoires et de l’autre côté, au-delà d’une écoute angoissée, l’arrêt fasciné et mortel dans… l’œil de l’autre !

 

Dans le trou noir galactique au centre de l'iris nervuré.

Noir n°29 de Jacques Monory, 1991

Noir n°29 de Jacques Monory, 1991

L’œil peut-il dévorer ? Où il s’agirait de dévorer son propre voir inversé… dans une tension de l’œil exorbitante!

 

Qu’est-ce que l’émoi ? Etymologiquement il provient de l’ancien verbe esmayer qui signifiait… perdre ses moyens. Ce n’est pas vraiment une émotion ou un affect: on ne bouge plus, comme retenu par des liens invisibles, tandis que peut se produire au même moment quelque chose de l’ordre du lâchage d’objet… on pisse dans son froc pour ne pas dire qu’on y chie. Mais ce sont souvent simplement  de bleues sueurs froides qui glissent sur la peau... comme pour mieux vous glacer mon enfant. Ou bien de rouges confusions qui chauffent et distendent vos joues pour que vous irradiez et ne puissiez vous cacher. C’est en tous cas différent de l’embarras qui a lui une dimension de piège… d’où l’on ne s’extrait parfois que par un franchissement ou un passage à l'acte qui vous fait passer par la fenêtre de votre propre imaginaire.

 

« Obstupecfactus » donc,… frappé d’immobilité et de stupeur. C’est la « fascinatio »… à l’étrange étymologie. Quignard rappelle que les romains ne disaient pas phallus pour signifier ce que les grecs appelaient phallos… ils l'appelaient « fascinus » et la fascinatio était la relation qui s’établissait entre le sexe masculin dressé et le regard qui le surprend dans sa contracture.

 

Et quand on sait que le verbe excitare fut d’abord un terme technique pour les chiens définissant les cris qu’on leur lançait pour qu’ils se lancent à la poursuite de la proie, on se dit finalement que l’homme se sent harcelé par le désir comme un loup.

 

Lacan voyait la Beauté comme une barrière interdisant l’accès à une horreur fondamentale… il la voyait comme la forme extérieure derrière laquelle s’enveloppent tous les fantasmes plus ou moins avouables du désir humain. Une horreur qui fait plus qu’affleurer dans le sublime que les anglais conceptualisèrent au XVIIIème à partir de l’oxymore de la « delightful horror » déjà chère à Mme de Sévigné qui parlait dès 1672 de montagnes… charmantes dans leur excès d’horreur. Et où, plus que l’espace qui sépare le spectateur de l’énorme amas de rocs  c’est sa découpe et le cadrage de sa taille qui font rempart… le rendant ainsi sublime. Pour Kant, la ligne de coupure qui définit l’infini en le délimitant est le lieu propre du sublime. Le sublime serait sans forme mais pas sans limite. Et selon Kant, il ne s’agit plus ici de jouer des formes car ce serait trop jouer à avoir peur. Où sous le masque de l’horreur, l’imagination tente de résister à l’horreur.

 

Mais comment prendre la mesure de ce qui terrifie. Dans le célèbre « King Kong » de 1933, un réalisateur (dans une mise en abyme qui deviendra chère aux films à grand spectacle) prépare l’actrice de son film à voir… l’incroyable. Il la dirige, conduisant ses yeux avec des mots afin de décomposer, articuler, scander, ponctuer son regard dans une mise en place graduée… qui doit précéder l’objet de ce regard. « Now Ann… When I start to crank, you look up slowly. You're quite calm. You don't expect to see a thing. Then you just follow my directions. All right? Camera… Look up slowly, Ann. That's it. You don't see anything. Now look higher. Still higher. Now you see it. You're amazed. You can't believe it. Your eyes open wider. It's horrible, Ann, but you can't look away. There's no chance for you, Ann. No escape. You're helpless, Ann, helpless. There's just one chance, if you can scream. But your throat is paralyzed. Try to scream, Ann. Try. Perhaps if you didn't see it, you could scream. Throw your arms across your eyes and scream Ann, scream for your life!!!”

 

Où l’incroyable au final tranche toute parole. Cela vous la coupe dans tous les sens du terme.

 

Mais en attendant… quelle jouissance !

Extrait de "Jurassic world"

Extrait de "Jurassic world"

Ce sont les cris d’enthousiasme répétés des spectateurs… à chaque apparition du monstrueux derrière sa paroi bleue dans le « Jurassic world » de 2015… encore une fois une mise en abyme du film à grand spectacle, un cadre dans le cadre, avec dans le bassin un impressionnant dinosaure marin capable d’avaler d’une seule bouchée un grand requin blanc. Où le monstrueux, poussé à l’extrême, déborde de partout… trop gros pour être vrai !

 

Un bord dentelé et monstrueux fait bouche trou !

Vache tranchée dans le formol de Damien Hirst

Vache tranchée dans le formol de Damien Hirst

Oú l'on se rapproche du trash en jouant non plus à avoir peur mais à  être... dégoûté. Le sulfureux Damien Hirst a d’ailleurs pris au pied de la lettre le tranchant du cadre en art... confectionnant des aquariums géants pour y conserver intact des animaux… avec toutes leurs tripes... bleutées. Où l’on a droit littéralement à la vue en coupe d’une vache tranchée dans le sens de la largeur, à jamais à l’abri de la corruption dans son bain de formol (même si parfois, paraît-il, la solution chimique peut se troubler au fil du temps et l’animal se décomposer peu à peu…). 

 

On n’y voit que du « blorrible bleau » par le hublot bleu… avec notre œil collé et scotché sur ce qui se montre et qui nous est montré… qui fait pression sur la paroi… dans un effet ventouse. Comme ce formidable poulpe qui s’attachera et s’attaquera au Nautilus du capitaine Nemo.

Montage photo

Montage photo

Où l’on en revient, si l’on regarde de près, à d’originaires plis et replis trash… bleutés ici… peut être pour adoucir la Chose… refouler le (sang)suel et aussi ce sang qui parfois suinte des plafonds et coule le long des murs chez Monory.

 

Alors Damien Hirst n’est pas allé jusqu’à trancher le grand prédateur des mers, préférant laisser à tout un chacun le loisir de se faire engloutir imaginairement par son fameux et superbe requin entonnoir… la gueule grande ouverte… avec sa série impressionnante de dents acérées, et son petit œil vide qui brille d’un éclat noir. Un clin d’œil aux… « Dents de la mer », le premier blockbuster à grand spectacle américain que Steven Spielberg réalisa en 1975 !

Détail d'un requin de Damien Hirst

Détail d'un requin de Damien Hirst

De profil… une silhouette acérée et effilée…  stoppée net dans sa charge… à jamais en érection. Longue, fine… parfaitement couronnée.

 

La paroi bleue de l'aquarium s’érige à la position même d’un désir effrayant de toucher ce à quoi il ne faudrait surtout pas toucher de peur de réveiller la Chose, ou d’y porter atteinte.

Le requin de Damien Hirst dans son aquarium

Le requin de Damien Hirst dans son aquarium

Le spectacle du sublime ne peut donc avoir lieu que si les tréteaux du théâtre sont dressés. Il en est de même pour… le crime au cinéma… où le metteur en scène se retrouve être un metteur en cage. Une cage bien entendu… fantasmatique. Monory aime peindre des scènes qui semblent sortir d’un film noir policier. Dans ce clair-obscur bleuté qu’il affectionne tout particulièrement.

 

D’une peinture bleue pour film noir. Où les calandres et les ailerons des belles américaines de l’époque font office de fascinantes et dangereuses gueules métalliques… la mort rôdant dans les intérieurs cuirs.

"Voiture de rêve n°1" de Jacques Monory, 2007

"Voiture de rêve n°1" de Jacques Monory, 2007

"Roman photo n°21" de Jacques Monory, 2008

"Roman photo n°21" de Jacques Monory, 2008

Le bleu qui se tend sur nombre des toiles de Monory, est la marque d’une grande excitation. Il y a de la tension dans l’air. Pour Lyotard, ce bleu est la jouissance qui s’approche, se gonfle, s’accumule mais ne décharge jamais. C’est la couleur de la montée en puissance. Chère au capitalisme... ou à l’érotisme… où tout est toujours une question de retenue. Mais le crime, au-delà du sexe et de l’argent qui sont en effet souvent ses moteurs, est surtout considéré par le réalisateur de film policier comme… un des beaux-arts, un fascinant spectacle. Où il faut se pencher aussi bien sur les… beaux et subtils mécanismes retors du cerveau humain que sur le pur fantasme sadomasochiste du… spectateur, soi-disant à l’abri de l’autre côté de la caméra… hors du coup ? 

les éléments du désastre n°32 de Jacques Monory, 1994

les éléments du désastre n°32 de Jacques Monory, 1994

Un suspens policier… esthétique et dramatique... sublime... avec en son cœur un meurtre… à élucider de bleu. Il y a quelque chose de l’action painting chez Monory… mais il s’agit d’un dépôt délicat d’un bleu froid et intense. Souffle suspendu, diaphragme bloqué... la tension monte.

 

Ce bleu est un peu le pendant du silence rouge du labo photo (à l’époque où l’on « développait » encore les photos), où se révélaient des secrets plus libidinaux… avec leur dimension d’inattendu. Non plus que veut-on de moi mais qu’est-ce qui va bien pouvoir surgir devant mes yeux ? C’est le fameux « Blow up » d’Antonioni. Où le photographe tente sans cesse de diminuer la distance qui le sépare de son objectif mais où l’image ne se laisse nullement posséder en ses derniers secrets. L’agrandissement pénètre dans le buisson et laisse plonger l’œil dans l’ombre: dans ses feuilles, étouffée, chauffe une ombre enflée. Qu’est-ce donc que cette forme informe ? Le medium éclate en taches et pixels! Le corps du délit serait-il insaisissable ?

Détail extrait du film "Blow up" d'Antonioni, 1966

Détail extrait du film "Blow up" d'Antonioni, 1966

Avec Monory le lieu du délit n’est plus quelque tache indiscernable mais une scène froide sous la clarté de la lune. Le bleu de Monory doit étouffer toute sensualité et figer le temps… pour mieux laisser se réfracter le suspens dans toute son acuité et sa sévérité. Un temps métallique qui fait évènement par ses bords tranchants, par sa découpe, par son encadrement. Plus que le zoom c’est la découpe du temps qui importe donc ici. Une somme d’arrêts sur image pour un drame en plusieurs actes et tableaux… numérotés.

 

Un « opéra glacé » et glaçant (c'est ainsi que Monory intitulera une série de toiles qu'il peindra en 1975). Un opéra où l'on chante jusqu’à en décrocher les lustres. Lacan avait remarqué qu'en analyse, lorsqu'un patient a une pensée agressive et qu'il ne l'exprime pas oralement, surgit alors à sa place une citation... musicale. L'opéra est la comédie chantée du désir, du secret et de la mort... qui se laisse voir sous tous ses angles chez Monory... dans un jeu de glaces... aux multiples reflets.

 

Quand il ne se passe rien, on observe d’autant plus… pour ne pas louper ce qui va se produire, immanquablement. L’arrêt dans le défilement, comme le détail dans le zoom, est alors investi d’un secret à dérober. Le scopique ne devient brillant, attirant, fascinant qu’au moment où le regard le brouille en l’évidant et pousse à venir s’user les yeux sur telle ou telle image.  

 

Avec ce besoin de figer la scène en tableaux, voire de la dédoubler dans un miroir (pour mieux réfléchir le point de vue à perte de vue haha).

 

« Tout à coup comme une chose vue en rêve… l’impression d’un carré de lumière encadrant la silhouette d’un homme dans une attitude spéciale, malaisée à définir. » Une scène inaccessible à première vue dont l’image parvient fortuitement à ce personnage d'un roman de Anna Katherine Green par le hasard d’un enchaînement de reflets traversant les pièces et déjouant les cloisons qui dissimulait le forfait au regard. 

 

Un regard éperdu dans une attente masochiste.

Opéra glacé n°9, opéra furia B de Jacques Monory, 1975

Opéra glacé n°9, opéra furia B de Jacques Monory, 1975

"Opéra glacé n°7" de Jacques Monory, 1975

"Opéra glacé n°7" de Jacques Monory, 1975

Le bleu de Monory fait bien selon Lyotard référence à la machine froide Deleuzienne du masochisme, où officie la fameuse femme à la fourrure avec son fouet, qui fait jouir précisément d’interdire la jouissance. C'est la femme fatale des films noirs américains, belle à faire peur dans son clair-obscur. Une déesse dont le corps de marbre brille entre les ombres… et qui en ôtant son long gant bleu de Prusse… sait parfaitement faire venir le bleu aux joues.

Opéra glacé n°13 (Sphex Opéra) de Jacques Monory, 1975

Opéra glacé n°13 (Sphex Opéra) de Jacques Monory, 1975

"Folies de femmes n°2" de Jacques Monory, 2005

"Folies de femmes n°2" de Jacques Monory, 2005

Le masochiste est un maître du sursis et du… suspens. L’important n’est pas ce qui se passe mais la conscience aiguë que cela va se passer. Où l’angoisse de l’événement joue les premiers rôles. N’attendre que l’attente elle-même… préférer les prémisses au développement... ce que désire le masochiste n’est pas de l’ordre de l’affect mais de l’intensité. Où il s’agit de jouir de désirer dans une jouissance suspendue. Dans un fantasme de non détumescence. Obsession de la castration. Où l’attente anxieuse seule serait à même de… déclencher l’orgasme !

 

Le masochiste serait donc celui qui vit l’attente à l’état pur. Alors il y a ce qu’on attend avec plaisir et qui tarde et les choses déplaisantes à quoi l’on s’attend et qui pourraient se… précipiter. Dans une tension… une intensité au-delà de la douleur et du plaisir. Le plaisir en retard énerve et découpe le temps en fines lamelles, tandis que l’intensité de l’attente du châtiment peut rendre possible la venue du plaisir. Attendre infiniment le plaisir ou s’attendre intensément à la douleur.

 

Mais laissons ce sado-masochiste de Proust, mieux nous expliquer de quoi il retourne dans cette tension. Ecoutons le narrateur de la recherche en train d’attendre Mlle de Stermaria et se laissant aller à quelques réflexions : « Et en somme, s’il est vrai qu’en général la difficulté d’atteindre l’objet d’un désir l’accroît (la difficulté, non l’impossibilité, car cette dernière le supprime), pourtant pour un désir tout physique, la certitude qu’il sera réalisé à un moment prochain et déterminé n’est guère moins exaltante que l’incertitude ; presque autant que le doute anxieux, l’absence de doute rend intolérable l’attente du plaisir infaillible parce qu’elle fait de cette attente un accomplissement innombrable et, par la fréquence des représentations anticipées, divise le temps en tranches aussi menues que ferait l’angoisse. »

Velvet Jungle n°12 de Jacques Monory, 1971

Velvet Jungle n°12 de Jacques Monory, 1971

Hypersensitive de Jacques Monory, 1970

Hypersensitive de Jacques Monory, 1970

Une baguette souple sabre l’air. Où l’on se retrouve haché menu… comme à la recherche du temps découpé.

 

Et toujours ce devenir tableau d'images saisies au... vol.

 

Une découpe en tranche du temps qui nous ramène à l’arrêt sur image. On n’est jamais loin du roman-photo policier… qui n’évite pas les clichés ! L’arrêt sur image c’est bien connu serait au principe du fétichisme. Une image arrêtée aux bords des jupes de la mère… en tant qu’elle l’a et ne l’a pas. Le dernier moment où l’on pouvait encore croire. Il faut lorgner parce qu’il ne faut pas perdre de vue ce dont on n’a pas la vue… ce qui fait perdre (et se perdre) la vue !! C’est toujours ce qu’on pourrait voir, ce qu’on risque de voir qui vaut le coup.

 

La scène primitive de la fascination c’est toujours la différence des sexes.

 

Lors d’une exposition, un miroir brisé et fêlé par des impacts de balles sur une toile de Monory (« Meurtre n°10 ») se trouva… refléter les seins d’une œuvre de Gérard Gasiorowski située sur le mur d’en face. Où le fétichisme de la coupure et de la ligne brisée se révèle dans toute sa splendeur.

 

Monory pratiquait le tir. Où il s’agit de projeter brutalement son désir. Avec une concentration qui trouve son sens et son accomplissement dans une détente brusque et l'atteinte d'un point d'exactitude et de fascination.  

S'ancrer de bleu

C’est l’étrange et inquiétante brisure que le miroir impose aux formes qui s’appuient tout contre lui… ce sont ces impacts de balle qui étoilent le vide comme pour y tisser les seuls filets à même de prendre au piège la Chose. Où il s’agit de ne pas perdre le fil de ce qui donne du fil a à retordre… cette différence des sexes qui bouge les lignes et brise à jamais le regard… mais qui ne tient pourtant qu’à un fil.

 

Eclats lunaires dans les pans d’ombre fourrés de bleu de Prusse… Toujours sur le fil du rasoir on n'y voit que du blanc dans l’ouverture des fourrures. Le sillon entre ses… aussi impeccable que celui d’une poupée !

Jeu de glace sanglant autour de tressages de Rouan

Jeu de glace sanglant autour de tressages de Rouan

Pour être informé des derniers articles, inscrivez vous :